Au Canada, la moitié (50%) des diplômé.e.s du collégial ou de l’université sont endettés une fois leur formation terminée. Et l’endettement médian tourne autour de 17 500$ ! C’est ce que nous permet d’apprendre une étude récente de Statistique Canada sur le sujet, publiée en 2020, mais portant sur des données de 2000 à 2015.
Quand on parle de dette d’études, on réfère aux prêts étudiants, qu’ils proviennent d’instances gouvernementales ou privées.
Quel type de diplôme risque le plus d’endetter?
Bien entendu, l’endettement dépend du type de diplôme et du domaine d’études. À votre avis, au Canada, quel est le type de diplôme et le domaine qui produit le plus d’endettement? Roulement de tambour… ce sont les diplômes universitaires, de type professionnel, du domaine de la santé : médecine, médecine dentaire, médecine vétérinaire, optométrie, pharmacie, etc.
Au Canada, la dette médiane des personnes détenant diplôme universitaire de type professionnel du domaine de la santé s’élevait à 60 300$ en 2015, soit presque le double de ce que la dette était en 2000 (39 800$)! À titre de comparaison, la dette médiane des titulaires d’un diplôme du collégial tournait autour de 11 500$ en 2015 et elle avoisinait les 20 000$ chez les titulaires d’un baccalauréat et d’une maîtrise. La dette médiane des détenteurs d’un doctorat frise les 25 000$.
Comme on peut le voir dans ce tableau produit par Statistique Canada, la dette médiane pour les diplômes autres que celui du doctorat a très peu changé en 15 ans.
Le Québec se distingue des autres provinces canadiennes
La dette étudiante moyenne au Québec
Au Québec, toujours en 2015, l’endettement étudiant selon le type de diplôme est relativement semblable, à l’exception du diplôme d’études collégial et du baccalauréat, où la dette d’études moyenne est plus basse que pour la moyenne du Canada. La dette d’études tourne ainsi autour de 10 000$ pour le diplôme collégial (11 467$ au Canada) et autour de 16 000$ pour le baccalauréat (20 004$ au Canada). C’est ce que révèle une récente analyse (2021) de la Chaire-Réseau de recherche sur la jeunesse du Québec.
Les cégeps, établissements scolaires uniques au Canada
Selon moi, cette disparité s’explique en grande partie en raison de l’existence des cégeps (collèges d’enseignement général et professionnel), des établissements scolaires qui dispensent des formations de premier niveau d’éducation postsecondaire, à faible coût, comparativement aux formations universitaires. Les cégeps furent instaurés au Québec en 1967 et aucune autre province canadienne ne possède une telle institution au sein de son système scolaire.
Des droits de scolarité relativement bas
L’autre raison principale de cette disparité concerne le choix historique du Québec, depuis le rapport Parent publié dans les années 1960, de démocratiser l’accès aux études supérieures au plus grand nombre. Encore aujourd’hui, les droits de scolarité dans les universités québécoises sont parmi les plus faibles dans l’ensemble du Canada.
À titre d’exemple, pour 2021-2022, au Québec les droits de scolarité (+ autres frais obligatoires) coûtent en moyenne 4 310$/année dans les programmes universitaires de premier cycle, tandis que la moyenne canadienne s’élève à 7 695$/année. La Nouvelle-Écosse gagne le prix des droits de scolarités les plus élevés, avec un montant de 10 039$/année au premier cycle universitaire. Les données sont tirées de Statistique Canada.
Les conséquences de l’endettement étudiant
Avant d’en arriver aux conséquences négatives de l’endettement étudiant, il faut savoir que l’accès à des prêts étudiants est considéré par plusieurs instances gouvernementales comme un tremplin vers les études supérieures. En effet, pour les moins nantis, la possibilité d’obtenir des prêts étudiants faciliterait d’une part leur accès aux études universitaires, et, d’autre part, favoriserait leur persévérance scolaire jusqu’à l’obtention du diplôme, car ils auraient moins à se soucier de leurs finances pendant leurs études.
Mais ce scénario idéal est bien entendu conditionnel à ce que l’étudiant.e ne se retrouve pas en situation de surendettement pendant ses études… ce qui transforme alors le projet d’étude en véritable boulet d’anxiété!
Voyons maintenant ce que nous dit l’analyse L’endettement étudiant au Québec. Des réflexions à l’égard de la littérature existante à propos des conséquences de l’endettement étudiant.
Le surendettement
De nombreux programmes universitaires débouchent à des professions très payantes. On n’a qu’à penser aux psychologues, aux ingénieurs, aux informaticiens, aux actuaires… La liste est très longue. Or, certains programmes, surtout ceux de sciences humaines et sociales, n’offrent pas les mêmes possibilités d’emploi. Et pourtant… le coût des études est parfois sensiblement le même!
Ainsi, certains finissant.e.s n’arrivent tout simplement pas à décrocher un emploi leur apportant un gain économique suffisant pour concilier le paiement de leur dette d’étude et la matérialisation de projets de vie typique chez les jeunes adultes : fonder une famille, acheter une première maison, etc. Sans oublier l’anxiété que peut générer le surendettement… pouvant même se transformer en dépression!
D’ailleurs, saviez-vous que selon la Loi sur la faillite et l’insolvabilité, il n’est pas possible, dans le cadre d’une faillite personnelle, de se délester de ses dettes d’études pendant sept ans suivant la fin des études? Le gouvernement offre néanmoins des moyens pour diminuer le fardeau du paiement de la dette d’études pour ceux et celles qui se trouvent dans des conditions précaires (ex. : le Programme de remboursement différé).
Une influence sur le choix de carrière
Une stratégie déployée par les étudiant.e.s pour éviter de se retrouver en situation de surendettement après leurs études consiste à s’inscrire dans des programmes plus courts et qui débouchent à des emplois plus payants. En soi, il n’y a rien de mal là-dedans. Il s’agit d’un calcul coût-bénéfice tout à fait responsable. J’y vois toutefois un double problème. Je vous explique.
D’abord, il se pourrait qu’en ne faisant un choix de carrière qu’en se basant sur les freins financiers, une personne passe carrément à côté d’une profession dans laquelle elle pourrait s’épanouir, autant professionnelle que personnellement. C’est-à-dire une profession en parfait accord avec ses intérêts, ses valeurs et ses forces. La satisfaction en emploi, ce n’est pas simplement positif pour le bien-être personnel, c’est aussi bénéfique pour l’employeur!
En choisissant un programme simplement pour des raisons financières, il y a le risque de former des travailleurs et des travailleuses qui se sentent moins interpellés dans leur travail. À long terme, cela peut mener à une perte d’implication dans le milieu de travail, à une baisse de productivité, voire à une forme de présentéisme. À mon avis, tout le monde est perdant dans ce type de situation.
Si vous êtes encore ici, c’est que cet article vous a plu! Si c’est le cas, écrivez-moi un petit mot en commentaire pour me signifier votre intérêt! Je compte bien écrire, dans les prochains mois, d’autres articles sur les études universitaires.